OFNAC : le dernier étage du chaos
- Renouvo Demokratik
- 26 août
- 3 min de lecture
Par Novavox, Notre Éditorial.-

Cela fait désormais plus de dix jours que le groupe armé Viv Ansanm a revendiqué la prise de la tour de contrôle de l’OFNAC à Kenscoff — un acte spectaculaire, diffusé en vidéo, qui a exposé au grand jour la vulnérabilité des infrastructures critiques de l’État.
Aux dernières nouvelles, il semblerait que les forces de sécurité aient repris le contrôle du site. Tant mieux pour le pays — mais cette reprise, aussi nécessaire soit-elle, ne suffit pas à effacer les questions brûlantes que cette séquence soulève.
Viv Ansanm ne conquiert pas seulement des territoires—ils occupent également le temps, l’image, et l’imaginaire. En s’emparant d’une infrastructure stratégique, Viv Ansanm ne perturbe pas seulement le fonctionnement aérien : ils mettent en scène l’effondrement de l’État. Leur occupation de la tour s’inscrit dans une logique de spectacle politique, où la terreur devient un langage plus puissant que les discours officiels.
La tour de l’OFNAC ne représentait plus la puissance étatique — elle en était le reliquat. En la prenant, Viv Ansanm n’a pas combattu l’État : ils ont traversé son absence. Ce n’est pas une guerre contre l’autorité. C’est une guerre contre son ombre.
L’espace aérien : zone de non-droit en haute altitude
Depuis près de quatre ans, le ciel haïtien est verrouillé par la violence armée. La crise du trafic aérien, l’une des multiples fractures que traverse le pays, a culminé en 2024, lorsque des tirs visant des avions civils ont conduit à la suspension des vols internationaux.
Ce blocage aérien incarne une République à genoux — incapable de protéger ses accès vitaux, prisonnière d’un vacarme qui dicte désormais la trajectoire. Les assurances s’effondrent, les vols domestiques deviennent inaccessibles.
La récente capture — ou paralysie — de la tour de contrôle de Kenscoff incarne une condensation symbolique de la crise aérienne en Haïti. Cette tour, censée incarner la souveraineté technique et la sécurité du ciel haïtien, se retrouve au cœur d’un paradoxe : alors même qu’un ambitieux projet de modernisation est en cours, financé par la BID et l’État haïtien, toute opération aérienne devient impraticable. Haïti se transforme en République sans ciel — révélant l’ampleur d’un effondrement national.
Ce n’est plus seulement le sol qui est disputé, mais aussi le ciel. Et dans un pays où l’aviation est vitale pour relier les zones enclavées, acheminer des marchandises et maintenir un lien avec l’extérieur, cette crise aérienne est une crise de souveraineté, de mobilité et de dignité nationale.
Un pouvoir spectateur de sa propre désintégration
La récente reprise de la tour de Kenscoff par les forces gouvernementales, annoncée sans images ni précisions opérationnelles, n’a en rien dissipé le malaise ambiant. Au contraire : elle souligne une gestion opaque, une communication fragmentaire, et une souveraineté qui vacille entre reconquête symbolique et improvisation tactique. Car reprendre la tour ne suffit pas — encore faut-il restaurer la confiance, garantir la sécurité, et affirmer une autorité qui ne soit pas seulement réactive, mais structurelle.
Combien encore faudra-t-il de crises, d’humiliations, de désastres — pour que les forces vives du pays cessent de ployer sous le poids de l’attente ? Combien de tours capturées, d’hôpitaux souillés, d’écoles vidées, de jeunes fauchés en plein rêve, de silences institutionnels empilés comme des tombes — avant que la dignité transforme l’indignation en force, la mémoire en levier, et le cri en stratégie ?
Le temps du renouveau est maintenant. Pas demain. Pas après les bilans. Pas après les excuses. Maintenant. Et nul pacte — ni signé dans l’ombre, ni scellé dans le confort, ni murmuré entre puissants — ne pourra l’endiguer.

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