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La qualification de la sélection haïtienne à la Coupe du monde 2026 : un éclat rare d’unité nationale

  • Photo du rédacteur: Renouvo Demokratik
    Renouvo Demokratik
  • il y a 3 jours
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 3 jours

Notre Éditorial,

Par : Alain Zéphyr, Sociologue.

La qualification d’Haïti à la Coupe du monde 2026 est vécue comme un moment d’unité nationale. Elle transcende les crises politiques, sociales et sécuritaires, offrant ainsi au peuple haïtien une victoire symbolique et collective après plus d’un demi-siècle d’attente.

Cet exploit est historique à plusieurs égards : Haïti retrouve la Coupe du monde pour la première fois depuis 1974, mettant fin à cinquante-deux ans d'absence depuis sa seule participation en Allemagne. La victoire décisive contre le Nicaragua (2‑0), conjuguée au nul entre le Costa Rica et le Honduras, a ouvert les portes du Mondial aux Grenadiers. Ce triomphe prend une dimension particulière dans un contexte marqué par l’insécurité, la violence des gangs et l’instabilité politique.

La victoire des Grenadiers, une épopée nationale forgée dans l’exil

Les conditions sécuritaires de la capitale, dominée par les gangs armés, ont empêché l’équipe nationale d’accueillir ses adversaires à domicile. Privée de son sol, de ses stades et de ses chants, la sélection haïtienne a vu ses matchs délocalisés par la FIFA à Curaçao. Sur ces terrains neutres, loin de la ferveur des tribunes familières, les Grenadiers ont affronté l’adversité avec une énergie qui dépasse le sport. Chaque rencontre fut un bannissement, chaque victoire une renaissance.

Ce parcours n’est pas une statistique figée dans les archives. C’est une proclamation éclatante de la dignité née de Vertières et de l’espérance invincible du peuple haïtien. Dans le cri des Grenadiers résonne la voix d’un peuple qui refuse l’oubli, qui défie l’effacement, et qui proclame son droit à exister, uni et debout.

Leur succès n’est pas seulement un exploit sportif; il est aussi mémoire, promesse, souffle et insurrection. Il rallume l’écho de 1974, mais le métamorphose en un rugissement contemporain : celui d’un peuple dispersé et meurtri qui, malgré les tempêtes et l’exil imposé, continue de croire, de combattre et de bâtir son avenir.

Un peuple uni au‑delà de ses blessures

Dans un pays marqué par de profondes divisions politiques et sociales, le football a offert un rare espace de joie partagée. Les célébrations à Port‑au‑Prince comme dans la diaspora ont révélé une véritable communion nationale. Force vive de cette aventure, la diaspora nourrit l’équipe : de nombreux joueurs évoluent en Europe ou en Amérique du Nord, et leur engagement incarne le lien vivant entre Haïti et ses communautés dispersées, renforçant l’idée d’une nation élargie. Ambassadeurs d’un pays en souffrance, les Grenadiers portent bien plus qu’un maillot : comme l’a souligné le sélectionneur Sébastien Migné, ils deviennent des symboles positifs pour un peuple qui manque cruellement d’occasions de fête (Le Figaro, 2025).

De la lumière des Grenadiers à la refondation d’Haïti 

La victoire de l’équipe nationale, perçue à juste titre comme une lumière et une respiration collective, met paradoxalement en relief nos faillites institutionnelles, économiques et sociales, ainsi que les conséquences du chaos sur l’avenir haïtien. Elle souligne les lacunes profondes dans la gouvernance, l’impact dévastateur et omniprésent de la violence des gangs et les défis persistants et complexes en matière de développement et de sécurité.

Imaginez l’impact si les Haïtiens avaient pu voir leur équipe se qualifier sur leur propre sol. Imaginez l’avenir de cette équipe nationale dans une Haïti stable, sécuritaire et souveraine. Imaginez si la jeunesse haïtienne pouvait offrir ses talents à un pays mieux organisé.

Ce triomphe est, hélas, le miroir impitoyable de nos manquements et l’injonction de reconstruire. Il nous appelle à faire de cette victoire non pas une célébration passagère, mais un engagement solennel de refondation nationale.

Il est prometteur d’entendre Duckens Nazon, le héraut des Grenadiers, dans un message diffusé sur les réseaux sociaux, appeler à la fin de la crise et à la réouverture du pays, affirmant qu’il se tient aux côtés du peuple haïtien (JCOM Haïti, 2025).

Duckens Nazon, le héraut des Grenadiers

Comme le rappelle Green (2024) dans le film Bob Marley: One Love, Bob Marley mit sa renommée internationale au service de la renaissance d’une Jamaïque déchirée par la violence politique dans les années 1970. De la même manière, la victoire des Grenadiers peut devenir un puissant levier d’unité nationale, permettant aux Haïtiens de bâtir une cohésion capable de résorber la violence et de sortir le pays de l’impasse.

Il revient aux amants du football, aux patriotes et aux progressistes haïtiens de se tenir aux côtés des Grenadiers, afin de transformer leur élan en une œuvre de réveil collectif  : une œuvre qui rallume l’espérance à l’éclat d’une aurore nouvelle, qui scelle l’unité comme une alliance inviolable, et qui grave dans l’histoire la dignité d’un peuple debout, marchant avec fierté vers un avenir de paix et de grandeur. Au sein du Renouveau Démocratique et de la Nouvelle Gauche, nous en ferons un chantier radicalement neuf, où chaque pierre posée portera la promesse d’une Haïti debout, sûre et solidaire.

En somme, la qualification des Grenadiers au Mondial 2026 est bien plus qu’un succès sportif : c’est une victoire symbolique qui rallume la flamme d’une nation dispersée et meurtrie, et qui rappelle que, malgré les fractures, Haïti peut encore vibrer d’une même voix.


Audio cover

References

  1. Green, R. (Director). (2024). Bob Marley: One Love [Film]. Paramount Pictures.

  2. JCOM Haiti. (2025, novembre 19). Duckens Nazon's message to the country after Grenadiers qualify for the World Cup [Vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=R8PLR9fz-UQ

  3. Le Figaro. (2025, novembre 19). Coupe du monde 2026 : « Je sentais qu’il y avait un truc à faire », comment Haïti et son sélectionneur français ont décroché une qualification historique. Le Figaro.


1 commentaire


Dimy Fluyau
il y a 3 jours

Cet article traduit une émotion profonde, empreinte d'honneur et de patriotisme. C'est un honneur pour moi de féliciter son auteur.

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