La démocratie en péril : L’impératif d’un retour à la Constitution de 1987
- Renouvo Demokratik
- 29 mai
- 8 min de lecture
Par : Yves Pierre,
Renouveau Démocratique

L'urgence du retour aux sources
Alors que le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) tente d'imposer un avant-projet constitutionnel qui sanctuarise la chaoscratie, il est temps de rappeler une vérité fondamentale : Haïti possède déjà une Constitution légitime, démocratique et progressiste - celle de 1987. Cette Constitution, adoptée par 99,81% des électeurs lors du référendum du 29 mars 1987, demeure le seul texte fondamental ayant reçu l'onction populaire authentique depuis la chute de la dictature duvaliériste.
Face à l'imposture constitutionnelle que représente l'avant-projet du CPT, le peuple haïtien doit exiger le retour immédiat et intégral à la Constitution de 1987, seule garante de ses droits et aspirations démocratiques.
La Constitution de 1987: Un projet populaire authentique
Une légitimité incontestable
La Constitution de 1987 fut élaborée par une Assemblée Constituante de 61 membres élus démocratiquement le 19 octobre 1986, dans un climat de liberté retrouvée après la chute de Jean-Claude Duvalier. Cette Assemblée reflétait authentiquement la diversité de la société haïtienne : intellectuels, syndicalistes, paysans, femmes, jeunes, représentants de la diaspora, leaders religieux.
Contrairement à l'avant-projet actuel concocté dans l'opacité par un "Comité de Pilotage" illégitime, la Constitution de 1987 résulta d'un processus transparent, participatif et démocratique. Les débats furent publics, radio et télédiffusés, et le peuple put suivre en temps réel l'élaboration de sa loi fondamentale.
Un mandat populaire écrasant
Le 29 mars 1987, dans un élan démocratique historique, 99,81% des électeurs approuvèrent cette Constitution. Ce score n'était pas le résultat d'une manipulation électorale, mais l'expression d'un peuple uni dans sa volonté de rupture avec la dictature et sa soif de démocratie véritable.
Cette légitimité populaire écrasante contraste dramatiquement avec l'absence totale de mandat démocratique du CPT et de son "Comité de Pilotage", qui tentent d'imposer une nouvelle Constitution sans consultation populaire authentique.
Les acquis démocratiques de la Constitution de 1987
1. La souveraineté populaire effective
L'article 17 de la Constitution de 1987 proclame: "La souveraineté nationale réside dans l'universalité des citoyens." Cette formulation claire établit le peuple comme unique source de légitimité politique, contrairement à l'avant-projet du CPT qui fragmente et confisque cette souveraineté entre diverses institutions non élues.
L'article 17-1 précise: "Aucune fraction du peuple ni aucun individu ne peut s'attribuer l'exercice de la souveraineté nationale." Cette disposition vise directement les tentatives de confiscation du pouvoir par des groupes illégitimes comme le CPT actuel.
2. Des droits fondamentaux robustes
La Constitution de 1987 consacre des droits fondamentaux avancés pour l'époque:
Droit au travail (art. 35) avec obligation de l'État de créer des emplois
Droit au logement décent (art. 22)
Droit à l'éducation gratuite (art. 32) à tous les niveaux
Droit à la santé (art. 19) avec système universel de soins
Droit à l'information (art. 28) et transparence gouvernementale
Droit à l'environnement sain (art. 253-258)
Ces droits économiques et sociaux, absents ou édulcorés dans l'avant-projet du CPT, constituent l'ADN progressiste de la Constitution de 1987.
3. Un système de séparation des pouvoirs équilibré
Contrairement à la fragmentation confuse de l'avant-projet du CPT, la Constitution de 1987 établit une séparation claire et équilibrée des pouvoirs :
Pouvoir Exécutif bicéphale rationnel
Un Président de la République responsable de la politique étrangère et de la défense, et un Premier ministre responsable de la politique intérieure et du gouvernement. Cette répartition évite les confusions de l'avant-projet du CPT où le Président est à la fois "Chef de l'État" et "Chef du Gouvernement".
Pouvoir Législatif fort
Un Parlement bicaméral avec des prérogatives étendues de contrôle de l'Exécutif, notamment le droit d'interpellation et de censure du gouvernement.
Pouvoir Judiciaire indépendant
Une magistrature inamovible avec un Conseil Supérieur de la Magistrature garantissant l'indépendance des juges.
4. La décentralisation véritable
La Constitution de 1987 prévoit une décentralisation authentique avec :
Autonomie des collectivités territoriales (art. 66-85)
Élection directe des maires et assemblées municipales
Transfert effectif de compétences et de ressources
Participation citoyenne aux décisions locales
Cette vision décentralisatrice contraste avec la pseudo-décentralisation de l'avant-projet du CPT qui maintient la tutelle de l'État central.
5. La protection contre les dérives autoritaires
La Constitution de 1987 contient des verrous démocratiques solides :
Non-rééligibilité immédiate du Président (art. 134)
Mandat présidentiel de 5 ans non renouvelable consécutivement
Interdiction de l'état d'urgence pour plus de 72 heures sans autorisation parlementaire
Contrôle parlementaire strict des forces armées
Interdiction du culte de la personnalité (art. 7)
Pourquoi la Constitution de 1987 fut-elle sabotée?
L'opposition des élites conservatrices
Dès son adoption, la Constitution de 1987 dérange les élites haïtiennes et leurs parrains internationaux. Son caractère progressiste, sa vision décentralisatrice et ses dispositions anti-corruption menaçaient directement leurs privilèges.
Le massacre de la ruelle Vaillant le 29 novembre 1987, qui fit au moins 34 morts lors des premières élections sous la nouvelle Constitution, marqua le début d'un sabotage systématique orchestré par les forces conservatrices.
Les amendements dénaturants
Plutôt que d'appliquer la Constitution de 1987, les gouvernements successifs la vidèrent de sa substance par des amendements dénaturants:
1987: Suspension immédiate par le gouvernement militaire
2011-2012: Amendements imposés par l’oligarchie de René Préval à Michel Martelly sans consultation populaire véritable
2019: Tentatives d'amendements autoritaires par Jovenel Moïse
Chaque modification affaiblit les contre-pouvoirs, renforça l'Exécutif et dilua les droits sociaux, trahissant l'esprit de 1987.
La complicité internationale
La communauté internationale, particulièrement les États-Unis et la France, ne vit jamais d'un bon œil le caractère progressiste de la Constitution de 1987. Ses dispositions sur la souveraineté nationale, les droits économiques et l'indépendance vis-à-vis des puissances étrangères contrariaient leurs intérêts géopolitiques.
Cette hostilité explique le soutien international aux différentes tentatives de révision ou de remplacement de la Constitution de 1987.
L'imposture de l'avant-projet du CPT face à la légitimité de 1987
Un processus illégitime contre un mandat populaire
Alors que la Constitution de 1987 fut adoptée par 99,81% des électeurs, l'avant-projet du CPT émane d'un "Comité de Pilotage" autoproclamé, sans aucune légitimité démocratique. Les prétendues "consultations" organisées ne peuvent en aucun cas rivaliser avec l'onction populaire de 1987.
Un recul démocratique manifeste
Comparé à la Constitution de 1987, l'avant-projet du CPT représente un recul démocratique sur tous les plans:
Droits sociaux: Là où 1987 garantit l'éducation gratuite à tous les niveaux, le CPT se contente d'un vague "droit à l'éducation".
Souveraineté populaire: Là où 1987 proclame la souveraineté dans "l'universalité des citoyens", le CPT la fragmente entre institutions technocratiques.
Conditions d'éligibilité: Là où 1987 promeut l'égalité politique, le CPT impose des conditions discriminatoires de propriété.
Contrôle de l'Exécutif: Là où 1987 établit des contre-pouvoirs forts, le CPT affaiblit le Parlement et renforce l'autoritarisme présidentiel.
Une stratégie de confiscation démocratique
L'avant-projet du CPT vise à institutionnaliser définitivement l'exclusion du peuple des décisions politiques. Ses mécanismes de révision quasi-impossibles (majorité des 2/3 dans chaque chambre + 2/3 des suffrages exprimés) visent à empêcher tout retour à une Constitution véritablement démocratique.
L'urgence du retour à la Constitution de 1987
Les conditions du retour
Le retour à la Constitution de 1987 doit être immédiat et intégral. Il ne s'agit pas d'une "inspiration" ou d'une "adaptation", mais de la restauration pure et simple du texte adopté par le peuple en 1987, dans sa version originale non amendée.
Cette restauration implique:
L'abrogation immédiate de tous les amendements postérieurs à 1987
La dissolution du CPT et de toutes les institutions illégitimes
L'organisation d'élections libres sous l'empire de la Constitution de 1987
La mise en place effective des institutions prévues par cette Constitution
Un nouveau souffle démocratique
Le retour à la Constitution de 1987 offrirait à Haïti:
Une légitimité restaurée: Retrouver une loi fondamentale véritablement choisie par le peuple
Des institutions crédibles: Élections sous une Constitution légitime, gouvernants avec mandat populaire authentique
Une vision progressive: Droits sociaux garantis, décentralisation effective, justice sociale
Une souveraineté retrouvée: Indépendance vis-à-vis des tutelles étrangères, autodétermination populaire
Un projet d'avenir: Une Constitution tournée vers le progrès social et l'émancipation collective
Les obstacles au retour et comment les surmonter
L'opposition des élites
Les classes dominantes haïtiennes et leurs alliés internationaux s'opposeront au retour à la Constitution de 1987 car elle menace leurs privilèges. Ils agiteront les épouvantails de "l'instabilité" et de "l'anachronisme" pour justifier leur résistance.
Réponse: La vraie instabilité vient précisément de l'absence de légitimité constitutionnelle. Une Constitution choisie par le peuple est toujours plus stable qu'un texte imposé par une élite.
Le chantage à la "modernisation"
Les partisans de l'avant-projet du CPT prétendront que la Constitution de 1987 est "dépassée" et qu'il faut une "Constitution moderne".
Réponse : Les principes démocratiques ne vieillissent pas. La souveraineté populaire, l'égalité des droits et la justice sociale sont toujours d'actualité. Si des adaptations techniques s'avèrent nécessaires, elles peuvent être apportées par amendements démocratiques après restauration de la Constitution légitime.
La pression internationale
La communauté internationale, habituée à traiter avec des régimes illégitimes en Haïti, pourrait s'opposer au retour à une Constitution véritablement souverainiste.
Réponse: Le peuple haïtien ne doit pas sacrifier sa souveraineté pour complaire aux puissances étrangères. Une Constitution légitime renforcera la crédibilité internationale d'Haïti.
L'appel solennel pour la restauration constitutionnelle
Haïtiennes, Haïtiens de l'intérieur et de l'extérieur!
L'heure est venue de dire NON à l'imposture constitutionnelle du CPT et de réclamer le retour immédiat à notre Constitution légitime de 1987.
Nous appelons solennellement:
Le peuple haïtien à se mobiliser massivement pour exiger l'abandon définitif de l'avant-projet du CPT et la restauration immédiate de la Constitution de 1987.
Les organisations populaires à organiser des assemblées de quartier pour expliquer les enjeux et mobiliser pour le retour à la légitimité constitutionnelle.
La diaspora haïtienne à faire pression dans tous les pays d'accueil pour que leurs gouvernements cessent de soutenir les régimes illégitimes en Haïti et reconnaissent la Constitution de 1987 comme seule loi fondamentale légitime.
Les intellectuels et universitaires à documenter publiquement la supériorité démocratique de la Constitution de 1987 sur l'avant-projet du CPT.
Les partis politiques authentiques à inscrire le retour à la Constitution de 1987 comme priorité absolue de leur programme.
La jeunesse haïtienne à revendiquer l'héritage démocratique de 1987 et à refuser qu'on hypothèque son avenir avec une Constitution de l'exclusion.
Les leaders religieux à éclairer leurs fidèles sur l'obligation morale de soutenir la légitimité constitutionnelle contre l'imposture.
La communauté internationale authentiquement amie d'Haïti à reconnaître que seul le retour à la Constitution de 1987 peut restaurer la stabilité démocratique.
Les modalités pratiques du retour
Une transition démocratique organisée
Le retour à la Constitution de 1987 doit s'organiser selon un calendrier précis :
Mobilisation populaire massive pour contraindre le CPT à abandonner son avant-projet
Proclamation solennelle du retour à la Constitution de 1987 par toutes les forces démocratiques
Formation d'un gouvernement de transition chargé d'organiser des élections sous l'empire de la Constitution de 1987
Organisation d'élections libres dans les 6 mois pour élire Président, Parlement et collectivités territoriales
Installation des nouvelles institutions légitimes et mise en œuvre effective de la Constitution de 1987
Un mouvement unitaire et inclusif
Cette mobilisation pour le retour à la Constitution de 1987 doit transcender les clivages partisans et rassembler tous les démocrates autour de cette revendication fondamentale. Il ne s'agit pas d'un projet politique partisan mais de la restauration de la légitimité démocratique.
L'heure de la reconquête démocratique
Trente-huit ans après son adoption triomphale par le peuple haïtien, la Constitution de 1987 demeure la seule loi fondamentale légitime du pays. Sabotée, trahie, contournée par les régimes successifs, elle attend sa résurrection.
Face à la tentative d'imposture constitutionnelle du CPT, le choix est clair : soit accepter la sanctuarisation de la chaoscratie par un texte illégitime, soit reconquérir la démocratie en restaurant la Constitution de 1987.
Cette Constitution n'est pas parfaite, mais elle est NOTRE Constitution - celle que nous avons choisie en tant que peuple libre et souverain. Elle porte en elle l'ADN de nos aspirations démocratiques, de notre soif de justice sociale et de notre volonté d'indépendance.
Le moment est venu de lui redonner vie. Le moment est venu de faire revivre l'espoir de 1987. Le moment est venu de reconquérir notre démocratie.
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