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Faux débats et vraies continuités

  • Photo du rédacteur: Renouvo Demokratik
    Renouvo Demokratik
  • 9 août
  • 5 min de lecture

Par : Hugue CÉLESTIN.

Membre de : Federasyon Mouvman Demokratik Katye Moren (FEMODEK)

& Efò ak Solidarite pou Konstriksyon Altènativ Nasyonal Popilè (ESKANP).

- PC: Novavox -
- PC: Novavox -

Le président irakien Saddam Hussein fut un allié zélé de Washington, encensé pour sa fermeté face à l’Iran. Approvisionné en armes et érigé en rempart contre l’islamisme chiite, il incarnait alors l’utile partenaire stratégique. Mais le jour où il cessa de convenir aux calculs géopolitiques de ses parrains, il fut brusquement requalifié en tyran à abattre. Humilié, traqué, exhibé comme un trophée devant le monde entier, il finit pendu. Il incarne à lui seul la règle d’or des relations néocoloniales : on est utile jusqu’à ce qu’on gêne. En Haïti, d’autres figurants, plus dociles encore, rejouent cette même partition sans fin. Il faut une dose remarquable d’innocence ou d’amnésie pour croire qu’on peut servir l’Empire sans être sacrifié au premier virage.

Haïti en 2025, à mesure que s’approche le 7 août, une crise soudaine de vertu recyclée surgit chez les indignés circonstanciels. En curés laïcs de la République, ils remontent en chaire, vocifèrent, s’agitent, feignent de découvrir un braquage institutionnel dirigé par les barons du capital. Ils dénoncent la mafia en veston-cravate, avec Laurent Saint-Cyr à la tête de la bande des truands, du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), cette pègre institutionnalisée et Alix Didier Fils-Aimé toujours à la Primature. Subitement, ils jouent les résistants de dernière heure, face à ces oligarques du secteur privé qui, attendaient leur tour avec une humilité de bon samaritain, les mains propres et les poches pleines. Ce n’est pas le peuple qu’ils défendent, mais le fauteuil perdu et la portion de gâteau qu’ils craignent de voir réduite.

Ces grandes voix étaient étrangement muettes lorsque le CPT, édition Edgard Leblanc Fils, Lesly Voltaire, Fritz A. Jean ; carburait à plein régime pour graisser les mêmes rouages, au service des mêmes maîtres. Où étaient ces apôtres de la vertu quand ces coordonnateurs pondaient des décrets creux avec bénédiction des ambassades, pendant que ports privés, monopoles d’importation et gangs certifiés du capital armé faisaient la loi ? Ceux qui hier traitaient les critiques de saboteurs se découvrent aujourd’hui une vocation d’opposants farouches. Tant que leurs messies respectifs siégeaient dans le fauteuil du coordonnateur et géraient la façade, tout allait pour le mieux dans la république des arrangements opaques. Ils parlaient de progrès, de gouvernance transitoire, d’avancée prometteuse dans la guerre contre les gangs-milices, de référendum salvateur et d’élections inclusives. Maintenant que d’autres pantins ont prendre la scène, ils ressortent la critique radicale du placard, comme une vieille arme remise au goût du jour.

Durant quinze mois de règne du CPT, le pays s’est enfoncé, méthodiquement, dans la misère chronique, l’insécurité des gangs-milices sous-traitants et la dépendance diplomatique dans la gestion du chaos programmé. On n’a vu ni la moindre réforme structurelle pour arracher les services publics à l’agonie, ni le moindre sursaut face à l’ordre économique cannibale, ni la moindre volonté de freiner la gangstérisation galopante. Au contraire, une prolongation bien huilée de l’État-fantôme, offert en offrande au FMI, à la Banque Mondiale, et aux parrains de l’économie souterraine. Ces grands indignés feignent d’ignorer que jamais le CPT n’a osé lever le petit doigt contre les monopoles, ni même cligner de l’œil face aux zones franches où la misère est exploitée à ciel ouvert. Il faut être d’une naïveté complice, ou d’un cynisme bien rodé, pour croire que l’essentiel du problème est le passage de Fritz Jean à Laurent Saint-Cyr.

Mise en garde du Département d’État et arrestation de Nenel Cassy

Le CPT, c’est le dernier gadget institutionnel fabriqué aux USA, vendu sous le label «transition démocratique », livré avec un manuel d’usage rédigé par le Département d’État. L’ambassade branche la prise, et règle les boutons. Elle choisit les Premiers ministres, compose les alliances bidon, édicte les plans de sécurité pour faire régner l’insécurité. La seule mission du CPT, préserver la tranquillité des nantis, le confort des expatriés, et l’ordre sacré du désordre. Il gère aussi la capitulation permanente de la nation, récite sans fausse note les psaumes du FMI, et distribue à la population les promesses frelatées de lendemains radieux. Les membres sont soigneusement triés, testés, formatés pour ne jamais déranger le pouvoir de l’Internationale, des classes dominantes locales et de la mafia économique. Il serait vain d’attendre d’eux une étincelle d’honneur ou un sursaut de souveraineté.

Quand le Département d’État ou son ambassade éternue, toute la domesticité locale s’enrhume. Qu’on ne s’avise surtout pas de tousser à contretemps. La punition est immédiate ; mise à l’index, lynchage médiatique, isolement diplomatique ou arrestation « exemplaire ». Le vrai chef n’est ni Saint-Cyr, ni Fritz Jean, ni Fils-Aimé, ni Voltaire, encore moins les braqueurs avilis. Il s’appelle : « Intérêt national des États-Unis. » Le dernier communiqué en date, bien plus qu’une simple note, tient du décret impérial camouflé, qui balise le jeu. À peine publié, déjà exécuté ; les horloges de la soumission se remettent docilement à l’heure de Washington, et le dernier figurant de service fait son entrée sous les projecteurs. Alix Didier Fils-Aimé peut enfin relâcher ses mâchoires ; il a esquivé la manœuvre du vieux magicien en fin de carrière, autoproclamé « Grand Maître Politique », et du dandy manipulateur, diplômé en cynisme.

Dans ce carnaval de dupes, Nenel Cassy a payé le prix des querelles d’ego entre le stratège du « Budget de Guerre », le nègre Zangi, et le télécommandant en chef des drones kamikazes. Il paraît qu’il aurait été cueilli sur ordre d’un obscur juge de paix de Delmas, livré pieds et poings liés aux policiers du fan-club Rameau. Sa tête brandie comme un trophée, trône désormais dans le salon VIP de l’ambassade américaine. Un acte inaugural de la nouvelle saison de la chasse aux « sanctionnés », mis en scène avec le zèle servile d’un État sous-traitant.

La valse des Conzé

Le 28 juillet 1915, les bottes des Marines américains écrasaient le sol haïtien pour « humilier l’Afrique dans les Caraïbes ». Cent dix ans plus tard, les fusils ont cédé la place aux accords humiliants, les soldats d’occupation avancent masqués sous les titres de « conseillers techniques », « envoyés spéciaux » ou « partenaires stratégiques ». L’occupation n’est plus un fait brutal, elle est devenue un art diplomatique raffiné, avec pour chef-d’œuvre le CPT. Qu’il soit dirigé par un économiste libéral grimé en progressiste (Fritz Jean), un sénateur recyclé dans l’obéissance (Edgard Leblanc), un architecte en service commandé (Lesly Voltaire) ou un gestionnaire du secteur privé (Laurent Saint-Cyr), le CPT n’est rien d’autre que le bras civil d’un projet de domination sous habillage transitionnel.

Face à cette soumission, une seule perspective tient encore debout ; la rupture sèche, brutale, sans appel, avec cette addiction à l’assistanat, ce réflexe pavlovien de la dépendance. Il est grand temps que le peuple haïtien se rappelle que la liberté ne s’obtient ni par protocole diplomatique, ni par consensus entre élites complices, ni par nomination étrangère. Il faut renvoyer les nouveaux Conze ; signer leurs feuilles de route ailleurs et affirmer haut et fort que seule une souveraineté populaire, arrachée par les masses, pourra clore ce feuilleton tragique des transitions sous tutelle.


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1 Comment


Fouq
Aug 09

Félicitations pour l'analyse, il faut le réveil d'esprit avant celui des corps

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